A priori, on pourrait se réjouir des excellents (et exceptionnels) résultats de l’accidentalité routière pour ce mois de mars 2020, dont le baromètre vient d’être publié par le Ministère de l’Intérieur, en charge de la Sécurité Routière. Mais, comme bien souvent avec les statistiques, il faut regarder à la loupe et faire des recoupements. Cela permet d’éviter de faire des raccourcis incertains et d’en tirer des conclusions erronées.
Trafic, accidentalité et mortalité
Une première constatation s’impose: les accidents corporels et les tués n’ont pas autant diminué que le trafic. En attendant les données officielles, AutoPlus cite diverses sources qui indiquent que la circulation pendant le confinement est de 3 à 7 fois moins élevée qu’en temps normal et que le niveau de congestion a pratiquement été divisé par 10 dans plusieurs grandes villes.
Or l’accidentalité n’a baissé que de 43,2 % et le nombre de tués de 39,6 %. Certes, il faut s’en réjouir. Toute vie sauvée est un cadeau et toute santé préservée une aubaine.
Cependant, c’est bien une hausse relative de la gravité que nous avons là. Mais rien d’étonnant puisque le même phénomène est déjà constatable lorsqu’on compare le trafic, les accidents et les tués en fonction de l’éclairement (jour ou nuit): lorsque le trafic est faible, voire nul, les accidents lui sont supérieurs et leur gravité est plus forte que le jour.
Et le taux de gravité ?
Pour les non-initiés, le taux de gravité est le nombre de tués pour 100 accidents corporels. Il permet de relativiser certaines données en donnant une notion de violence des collisions.
Pour 2019, avec 3 312 personnes décédées et 56 313 événements accidentels, cela donne un taux de 5,88. Et sur 12 mois glissants (de mars 2019 à février 2020) cela donne même 5,80.
Avec 154 tués et 2 443 accidents, ce mois de mars 2020 affiche un taux de 6,30. En appliquant ce taux à mars 2019, pour le même nombre d’événements, nous aurions eu plus de 3500 tués. En tenant compte du fait que les mesures de confinement n’ont pas touché la première quinzaine du mois, il est plus que probable que le taux des deux dernières semaines est encore plus élevé.
La presse avait déjà relevé une flambée est excès de vitesse; la gravité croissante des accidents vient juste confirmer que les lois de la physique sont incontournables. Et nous nous rapprochons soudain du taux record de la fin des années 90, où nous avions frôlé les 7% en 1998.